adresse et remerciements Petits Lieux

Les Arts

Mars 2003: l'éditorial de Suzanne Ferry

Le 22 mars, le 22bis fêtera ses sept printemps.
L'âge de raison, dit-on.
J'espère que non.
C'est trop tôt pour la nostalgie, mais pas pour les bons souvenirs.
Et que coule, coule encore l'encre qui noircira les pages où vous chantez la vie, le rire, l'émotion ou la rébellion… Avec la petite fée espérance chaque fois que se pointe quelque moment pénible:

Que puis-je vous offrir
Pour vous permettre encore
Aujourd'hui d'espérer…
… Que puis-je vous chanter… (E. Andilhac)

Le film Frida Kahlo est actuellement sur les écrans du haut de la ville. Intense… Malheureusement en version anglaise. Il y manque les couleurs chatoyantes de la langue espagnole.

Actuellement, nous vous demandons une participation aux frais de 3€ pour nos spectacles, sauf pour les Jeudis Acoustiques où l'entrée est libre. Toutefois, certains artistes déterminent eux-mêmes le montant du droit d'entrée. Dans ce cas, nous l'indiquons dans le programme.

Par un document digne de foi, paraît-il, reçu en décembre, nous avons appris qu'un frère de Bush possède un des sept puits de pétrole de l'Equateur. Oserait-on imaginer que la simple jalousie fraternelle serait à l'origine de …

Frida Kahlo, peintre mexicaine

Aujourd'hui, non à la politique, aux controverses, au commerce mondial; non à la guerre. En ces jours où l'on retient son souffle: "Va-t-il oser?" nous partons à la découverte de l'intensité… Nous avons choisi de vous présenter la fascinante Frida Kahlo, peintre mexicaine, provocante, rebelle, révolutionnaire, voulant vaincre son handicap avec un courage surhumain. Elle tenta de s'élever de l'ordinaire sans jamais cesser d'aimer les humiliés.

Frida Kahlo est née en 1907 à Coyoacan, dans la banlieue de Mexico. A six ans, une poliomyélite qui l'immobilisa durant 9 mois la fit surnommer Frida pata de palo (jambe de bois) par ses camarades. A 15 ans, elle entra à l'université en "prépa", choisissant la médecine mais, en 1925, c'est l'accident effroyable dans un bus – onze fractures à la jambe et le corps transpercé par la main courante avec écrasement du pelvis et fractures multiples de la colonne. Pour les médecins, Frida est condamnée. Elle survit non par miracle, mais par la force de son caractère, "son sens de l'humour et sa vaillante bonne humeur."

A l'hôpital, elle lit beaucoup: poésie chinoise, Bergson, Zola, Proust, Jules Renard, des écrits sur la révolution russe, des ouvrages sur Dürer et Botticelli. Elle revient chez elle, à la "casa azul", sanglée d'un corset de plâtre pour de longs mois. Sa mère l'installe dans un lit à colonnes, un miroir accroché au baldaquin; son père lui offre une boîte de couleurs.

Plus question de poursuivre ses études. Elle scrute le visage que lui renvoie le petit miroir, éclairée de la vision des grands portraitistes allemands et italiens. De cette confrontation à sa propre identité surgit ce qui touche à l'essence de l'art: celle de l'illusion, du dédoublement et du rapport à la mort. Plus qu'autobiographiques, ses portraits se révèlent images de l'intérieur, nés d'une recherche à la fois esthétique et existentielle. Toute jeune, elle aidait son père aux retouches dans son atelier de photographe. Elle en garde la méticulosité, l'obsession du détail réaliste. Sortie du plâtre, Frida cherche à gagner sa vie et, contre toute attente, par sa volonté surtout, retrouve l'usage de ses jambes.

C'est alors la rencontre avec ce grand homme qu'elle admire: le peintre Diego Rivera. Elle sollicite son avis sur ses toiles: il est impressionné. En 1929, ils se marient: "A ver que sale" (Voyons ce qui en sortira) dira-t-on. Dans l'ouvrage Regards croisés* (qui fut notre principale source d'informations), on peut lire: "La vie commune des deux peintres fut un débordement d'épisodes insolites. On mit le nez dans leurs draps pour comptabiliser leurs aventures amoureuses et sexuelles ainsi que les épreuves physiques et mentales de Frida – pourvue d'une force vitale et d'une résistance à la douleur bien au-delà de la normale. Sa beauté et sa personnalité s'exprimaient jusque dans sa coiffure, ses vêtements, ses bijoux plus insolites que précieux."

Deux avortements tragiques, l'un à Mexico, l'autre aux Etats-Unis, marqueront profondément ses toiles et ses ex-voto où elle touche au surréalisme, osant exposer sa psyché dans toute sa complexité; mais elle est trop libre pour se laisser enfermer par les surréalistes qu'elle trouve "terriblement putes et foutrement intellectuels."

Picasso avouera à Rivera "Ni Derain, ni moi ni toi ne sommes capables de peindre une tête comme celles de Frida Kahlo." Ayant mal accepté l'aventure de Diego avec sa sœur Cristina, Frida divorce en 1939 et le réépouse 18 mois plus tard sur l'insistance de celui-ci après qu'elle eut défini leurs territoires respectifs.

En 1946, ne pouvant plus se tenir ni debout ni assise, elle accepte une nouvelle greffe osseuse à New York qui s'avère un échec. En 1950, une autre opération à Mexico lui rend la joie de vivre. Pourtant, elle a failli rater sa dernière exposition à Mexico. Le médecin lui interdit de quitter son lit. Diego la fait transporter dans son lit jusque là, la joie triomphant de la douleur. Quelques mois plus tard, on l'ampute de la jambe droite. Elle écrit:" Pourquoi aurais-je besoin de pieds puisque j'ai des ailes pour voler." Elle meurt en 1954, trois ans avant Rivera, sa passion, son amour, "son deuxième accident."

* Regards croisés, Diego Rivera – Frida Kahlo publié à l'occasion de l'exposition à Paris en 1998.

Mai 2005: l'éditorial de Suzanne Ferry

Tournai: cinq clochers et 400, - pardon - quatre sans cloche?

Vous me pardonnerez ce lieu commun pour vous donner des nouvelles de la Cathédrale de Tournai, ébranlée en 1999 par la tempête, fermée puis rouverte, fermée encore et accessible à nouveau depuis peu.

Le dimanche 17 avril, l'équipe dirigeant les travaux (architectes, ingénieurs, archéologues) était présente. Ils accueillaient par petits groupes des gens avides de découvertes et d'informations. C'est que depuis qu'ils y travaillent, le bâtiment leur a livré bien des secrets qu'ils veulent partager. La visite s'est déroulée en cinq étapes:

1. Les infos générales: la partie romane fut érigée fin du XIe siècle. Le chœur (gothique) en 1243. Le bâtiment a vite bougé. A droite, il reposait sur un rocher, à gauche, sur du remblais. Dès le XVe siècle, on a posé des tirants sous la voûte (comme à St Bavon et à St Michel). Quinze jours après la tornade de 1999, il y eut une fissure, on posa un tirant empêchant son élargissement. La tour Brunin penchait vers les archives d'état et l'habitat. On est allé voir dessous, on a percé jusqu'au rocher 250 colonnes que l'on a remplies de ciment avec une pression de 400 kg. Les contrôles sont permanents, faits aujourd'hui par des appareils électroniques de très haute technologie.

2. L'archéologie des bâtiments: elle a trois missions: a) le suivi du chantier; b) l'enregistrement des modifications et la démolition de certains murs pour le passage des machines ainsi que l'entrepôt de l'autel Ste Marguerite, des pierres renaissance, 200 sculptures, etc.; c) l'étude des charpentes. on eut la bonne surprise de découvrir que la charpente de la flèche est romane. Il n'en reste que 2 en Europe. L'abattage des arbres de la forêt locale eut lieu de 1138 à 1148. Le séchage d'un siècle est requis pour la menuiserie et l'ébénisterie. Pour la charpente, le bois de chêne encore vert est plus facile à travailler et il durcit avec le temps. Les poutres ont 14 m de long sur 33,5 cm.

3. L'autel Ste Marguerite et sa fresque murale de toute beauté dont le superbe bleu du fond est fait de lapis lazuli, acheminé d'un gisement d'Afghanistan par Baudouin (je ne sais combien). L'histoire racontée est celle de Ste Marguerite, vouée à Dieu, et refusant les avances d'un guerrier romain. Torturée et décapitée, un ange vint la chercher. Vers 1170, il y avait aussi pas mal d'échanges commerciaux avec l'Angleterre, très friande de la pierre de Tournai.

4. L'archéologie du sous-sol: par les couches successives, on remonte les siècles. a) à 5 ou 6 mètres de profondeur, on a découvert ce qui fut vraisemblablement des thermes romains (IIIe et IVe siècles); b) puis vers le Ve siècle, un bâtiment très long (paléo-chrétien); c) au VIe siècle, ce sont les Mérovingiens qui récupèrent les cuisines. On y voit notamment une cheminée dans la couche d'argile. Ce fut probablement la dernière occupation domestique avant la première église; d) au IXe siècle, église carolingienne où l'on peut voir la première cuve baptismale, le baptême ne se faisant plus par immersion; e) début XIe siècle, construction pré-romane avec fragment d'une belle dalle. Pour rappel, l'édifice actuel fut construit fin du XIe siècle.

5. Les architectes doivent prendre des décisions importantes dans la suite des travaux au niveau de l'espace notamment. Plusieurs solutions s'offrent à eux pour la structure et la restauration, en accord avec les archéologues. Il faut sans délai la rouvrir au culte, à la culture, à la vie - le transept servait de passage aux habitants, leur évitant un détour. Il faut songer à remettre les vitraux du XIXe siècle - uniques paraît-il. Classée au patrimoine de l'humanité qui donne le droit et devoir de l'entretenir, les travaux coûtent cher, financés à 95% par la Région wallonne et 5% par la Province. Sans complications majeures, les travaux dureront 10 ans.

On a enlevé ce qui était baroque mais pas remis l'ambiance médiévale. Comment reconstituer l'ambiance chromatique des fûts et des chapiteaux des colonnes, des murs et parements supérieurs? Comment concilier respect de la situation romane et logique actuelle? Se poser des questions, c'est éviter bien des erreurs! A la fin de notre visite, il nous a semblé que ce haut lieu de culte et de culture était en de bonnes mains.

Retour

Septembre 2007: l'éditorial de Suzanne Ferry

Carnet rose

Nos amis Sibel et Daniel Vincke ont reçu le plus merveilleux des cadeaux en cette fin du mois d'août: un petit Dem de 3,850Kg. Nul doute que les fées musique, humour et talent se sont penchées avec grâce sur son berceau.

Carnet rosse

La femme serait vraiment l'égale de l'homme le jour où, à un poste important, on désignait une femme incompétente.

Françoise Giroud

La vie de château (Louis II de Bavière)

C'est la rentrée, sauf pour nos politiciens qui, eux, ne sont jamais sortis, et ne sont même pas sûrs de réussir leurs examens de passage. Pauvre B.

Que penseraient-ils de tout cela, mes oncles Henri et César, venus de Grammont au début du XXe dans ces régions boraines où ils ont épousé les soeurs de ma mère, ont fait fortune et avec qui nous nous sentions si bien?

Mais quittons ces sujets sérieux pour prolonger nos vacances. Je vous emmène donc dans ce château de conte de fées, le Neuschwanstein, par la route de la Franconie jusqu'aux Alpes bavaroises? Un temps superbe, un air pur comme on n'en fait plus et le fantôme de Louis II, roi de Bavière régnant encore sur tout cela!

Louis II est né le 25 août 1845 près de Munich. Il fut roi de 1864 à 1886. Sa mort, à 41 ans, 3 jours après sa destitution (pour cause officielle de folie) reste une énigme, même si la thèse la plus plausible reste l'attentat.

C'est un prince timide, vite blessé, marqué par les arts, principalement la musique et l'architecture. Il reçoit une éducation très stricte entre sa mère Marie, princesse de Prusse et son père Louis Ier. Comme ce dernier, il est replié sur lui-même et comme sa mère (fondatrice de l'alpinisme) il adore la nature.

C'est à 16 ans, quand il assiste au spectacle de Lohengrin, qu'il connaît un véritable choc musical. Et Wagner entre dans le monde de Louis II ce jour-là.

Son père voulait l'initier à ses futures fonctions de roi, mais ça ne l'intéresse pas. Hypersensible et d'une âme fragile, il se réfugie dans le rêve et les arts. Il n'a pas 18 ans quand, son père contraint d'abdiquer, il se retrouve roi de Bavière.

C'est un garçon intelligent, il n'est jamais dupe mais n'aime pas la discussion. Un de ses premiers actes de souverain est la recherche de Wagner. Celui-ci se cachait, criblé de dettes. C'est une rencontre historique. Louis est totalement voué à l'art, il veut vibrer, Wagner veut la gloire et la fortune. Dix-neuf ans d'une amitié ambiguë: Wagner aime les femmes, Louis II admire Wagner. Homosexuel inavoué, ce fut sans doute la principale cause de son déséquilibre: la pesanteur de la morale de l'époque a joué un rôle dévastateur sur l'âme de Louis II. Il y avait dédoublement; le roi était fort, l'homme était faible. Cinq cent nonante-deux mille mark or: c'est ce que dépensa Louis II pour Wagner, pour son théâtre de Bayreuth et sa « protection ». Pressé de se marier et de donner un héritier, il se fiance... Sophie Charlotte (la soeur de Sissi), il retarde une première fois le mariage puis redit son amitié sans amour à Sophie. C'est la rupture. Elle épouse le Duc d'Angoulême.

Il a finalement la tâche, durant son règne, de gérer la politique audacieuse de Bismarck. En 1866, c'est la bataille de Sadowa, en 1870, la défaite de la France, deux événements qui vont achever l'intégration du royaume de Bavière à l'Allemagne naissante. Bien que gardant son indépendance, c'est contraint et forcé qu'il signera ce document. Il voudrait abdiquer en faveur de son frère Otto, mais celui-ci est dément. Louis II n'a de respect que pour Bismarck et d'amour que pour Wagner. À chaque difficulté, il trouve refuge dans la construction de châteaux qui vide les caisses de l'Etat. Louis et sa cousine Sissi se rencontrent souvent, ils vivent tous les deux la nuit. Elle le dit « tourmenté mais pas fou ». Son psychiatre veut pourtant l'interner. Bismarck, seul, ne s'y trompe pas. Le petit peuple empêche de l'emmener mais Louis II « ne veut pas que le sang bavarois coule ». On connaît la suite: on retrouve Louis II et son psy dans le lac de Starnberg trois jours plus tard.

De son vivant, il organisait des spectacles de Wagner pour lui seul. Le décor y est toujours, sa loge aussi. Il a vidé les caisses de l'état pour ses châteaux et ne voulait pas qu'on les visite, ayant horreur de la foule. Et voilà que trois mois plus tard, inachevé, Neuschwanstein est ouvert au public et ne désemplit pas. Il accueille aujourd'hui près de trois millions de visiteurs chaque année. Les caisses vidées par un roi visionnaire (ou pas) font penser qu'il a remboursé sa dette au centuple. Et ce n'est pas fini. Avez-vous visité Neuschwanstein?

Retour

Février 2009: l'éditorial de Suzanne Ferry

Martin Luther King…, un rêve
Mandela Président…, un défi
Obama…, un espoir
pour ces temps neufs
de cet an neuf.

(J. Haub.)

Ah ! Ces poètes…

Consolation positive du Prince de Ligne: « Je rentre dans l’hiver à force de printemps. »

A mettre en opposition avec le mot de Frédéric Dard: « Si je parviens à éviter la soixantaine… c’est que je serai mort avant. »

D’un humoriste français, cette courte définition de la Paix, bien à l’ordre du jour: « guère fréquente ». Et parlant d’un monsieur trop mince : « guère épais ».

Nous vous annonçons déjà pour le prochain programme le concert de Daniel Hélin, en avril probablement, ainsi que d’un groupe dont nous espérons le passage depuis 12 ans… Mais chut, nous attendons confirmation.

P A X...

La prochaine fois que vous traverserez notre Grand-Place, arrêtez-vous donc face à l'ogive du portail d'entrée, sous la tour de l'hôtel de ville... Faites deux pas vers la gauche, et levez les yeux... Là se trouve la statue de la Paix. Quel symbole à découvrir, quels voeux à formuler, quel chaleureux remerciement à l'artiste qui l'a plus que tout autre parée de grâce et de beauté ! Des 270 statues qui ornent le bâtiment, j'ose affirmer qu'elle est la plus harmonieuse et la plus achevée dans l'expression... Ce geste gracile de la main qui va vers l'épaule à la rencontre d'une colombe, la jeunesse tendre du visage, le corselet serré et entrelacé en forme de vertugadin, soulignant la beauté du corps, ainsi que le mouvement gracieux des plis de sa robe retenus par l'autre main... tout est perfection. Fallait-il que le sculpteur accorde d'importance à ce symbole pour vouloir y mettre tant d'atouts.

Les événements du monde qui se succèdent et se surpassent en violence nous invitent à nous arrêter... Paix des nations et paix des coeurs. Merci, l'artiste de nous y faire penser.

de quand datent ces statues?

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, les statues furent ajoutées vers 1850 seulement. Pour beaucoup, elles représentent des inconnus apposés de manière incohérente alors que toutes ont été soigneusement choisies et justifiées par les archivistes. Comme tous les projets, ils suscitèrent polémique: c'est qu'on omit de donner au public le pourquoi et le comment des décisions.

Les statues de la façade, c'est toute l'histoire du Brabant et de Bruxelles, qui débute vers 590 avec Pépin de Landen, se prolonge avec Lambert le Barbu (950), les ducs de Bourgogne ensuite (1430) jusqu'en 1556 avec Ferdinand, frère de Charles-Quint.

Les notices biographiques en témoignent: au-delà des souverains représentés, ces sculptures laissent percevoir une partie de l'histoire économique, sociale et religieuse, ainsi que l'évolution de l'histoire des siècles liée à notre vie d'aujourd'hui.

comment choisissait-on les artistes?

La ville désirait surtout attirer de jeunes artistes. Ils furent nombreux à envoyer une lettre de sollicitation. Après commande, ils devaient soumettre leur ébauche à l'approbation du collège. Ce n'est pas par hasard que nous avons choisi parmi eux Charles Auguste Fraikin puisque nous lui devons « La Paix ».

Fraikin se lance d'abord dans des études de pharmacie avant d'aborder la sculpture à Anvers puis à Bruxelles. Il fut chargé de l'exécution de cinq saints patrons de Bruxelles ainsi que de six vertus allégoriques représentant, outre la Paix déjà citée, la Prudence, la Justice, le Courage, la Modération et la Loi. Toutes ces statues étaient destinées au porche principal de la tour. On lui doit également « Vénus et l'Amour » se trouvant au Palais des Beaux-Arts, ainsi que la très célèbre statue des comtes d'Egmont et de Hornes, objet de vives polémiques, notamment entre messieurs de Brouckère, bourgmestre et Anspach, alors échevin et ensuite successeur. Des journaux prirent parti pour ou contre les vertus attribuées aux sujets,. A cette occasion, Charles Buls prononça un remarquable discours ayant comme objet « la compréhension et la tolérance ». La célèbre statue n'en déménagea pas moins de la Grand-Place au centre du jardin du Sablon.

Fraikin eut pour élève Constantin Meunier. Il s'éteignit à Scharbeek en 1893. La prochaine fois que vous traverserez la Grand-Place…

Sources: le remarquable ouvrage de Herman Van Nuffel: « Les statues de l'Hôtel de Ville de Bruxelles » et notre amour sans modération pour la Grand'Place.

Retour

Septembre 2010: l'éditorial de Suzanne Ferry

Ah! Cette 9e biennale, que d'émotions!

Voici le palmarès du jury:

  1. la supériorité incontestée de Karim Gharbi
  2. le groupe Coenguen
  3. Jules & Jo
  4. Pierre Simon
  5. Florian Parra

Sur l'édito du programme papier, à mentionner nos réactions à chaud plutôt que les décisions du jury. Veuillez nous en excuser…

A souligner: le renouveau de l'équipe de la biennale qui a si bien communiqué avec nous, les petits lieux, tout au long de cet "événement chansons".

***

De grandes théories vis-à-vis de la chanson française? En ai-je entendues en 40 ans de chansons!

***

Et Karim Gharbi, grand vainqueur de la 9e édition, est-il susceptible de cartonner en radio? On ne le saura jamais puisque de toute façon, personne n'en prendra le risque. On peut rêver cependant…

Victor HORTA, architecte

Et s'il n'avait pas eu ce caractère indépendant… S'il n'avait pas été cet enfant rebelle en butte à l’autorité de sa mère et qui se faisait renvoyer d'école en école… S'il n'avait ce goût du travail bien fait, hérité de son père cordonnier "avec brevet de maîtrise", et qui pratiquait la musique à chaque instant perdu, ouvrant le jeune Victor à l'éveil artistique… Enfin, s'il n'avait connu ce déclic, cette fascination en visitant les chantiers de son oncle entrepreneur, serait-il devenu ce chef de file incontesté de l'Art Nouveau en Belgique? À douze ans, il décide qu’il serait architecte.

Victor Horta est né à Gand en 1861. De l'enseignement traditionnel abhorré, il se retrouve à l'école industrielle de Gand. En dépit de rencontres fructueuses et de remarquables aptitudes pour le dessin, il fait face aux mêmes obstacles: la discipline scolaire. Délaissant les raisonnements maternels, il est engagé par un entrepreneur et c'est une formidable avancée dans sa connaissance de la construction et des matériaux.

Lorsque son père lui trouve un stage chez un ami architecte décorateur à Montmartre, c'est l'envolée. Il a 17 ans. Dans un univers de guinguettes et de midinettes, il côtoie Van Gogh et bien d'autres. Il découvre surtout les musées, les monuments ainsi que l'importance des matériaux nouveaux: l'acier et le verre. Une décision s'impose à lui: il veut élaborer une architecture neuve et personnelle, délaissant l'imitation des classiques où l'éclectisme de l'assemblage est la seule originalité. Avec son patron, il travaille avec maîtrise le matériau qu'il utilisera abondamment dans son oeuvre: la pierre calcaire, appelée en Belgique pierre de France. Il flirte avec le travail du bois. (Il dessinera, plus tard, les meubles qui décoreront ses constructions). Il découvre l'asymétrie des lignes décoratives ondulantes de l'estampe japonaise.

C'est alors qu'un événement douloureux le ramène à Gand: la mort de son père. Muni d'un petit pécule, il part pour Bruxelles, capitale en pleine expansion, lieu de rencontre idéale entre culture latine, germanique et anglo-saxonne. Il s'inscrit en architecture à l'Académie des Beaux-Arts: 3 ans d'étude intense. Remarqué par ses professeurs, il est engagé comme stagiaire par l’un d’eux: Alphonse Balat, ce qui lui permit de participer à l'édification des serres de Laeken. Véritable génie, il alla au-delà du travail de son maître pour trouver son propre style. Il entreprit alors la construction de trois maisons à Gand, à la satisfaction de sa femme Pauline, matériellement rassurée. Mais il consacre ensuite beaucoup de temps à l’élaboration de socles des statues qu'on lui commande. Dans sa recherche de l’absolu, il joue des masses, des vides, des pleins, recherche les proportions idéales pour la mise en valeur de sculptures dont l'exemple le plus probant est l'édicule de Jef Lambeaux au parc du Cinquantenaire.

Viennent ensuite 15 années de création intense, ses plus belles constructions avec "puits de lumière" placé au centre de la maison. Ses premières commandes émanent de ses amis de la Loge: Eugène Autrique(*) et Emile Tassel. Le style est surprenant par ses audaces décoratrices où "le fer se mêle à la pierre de manière apparente et curviligne."

Certains s’étonnent de ce talent subit, ignorant les années passées dans l’ombre à parfaire ses idées. Avec la construction de ces deux hôtels, les commandes affluent, Horta travailla parfois sur plus de dix projets différents. Citons les hôtels frison, winssinger, solvay, van eetvelde, l’école de la rue de St ghislain, la maison du peuple de Bruxelles, (démolie en 1965), l’hôtel aubecq, (abattu en 1950 et marquant le début de la "bruxellisation"). Hélas, plusieurs de ses œuvres ont été démolies ou incendiées (comme le magasin de l’Inno en 1967). Citons ici l’acharnement zélé de son élève Jean Delhaye qui sauva plusieurs bâtiments de la destruction, notamment l’hôtel tassel. Quant à la seule construction qui puisse faire référence en France, le château de Chamblay, près de Metz, elle fut complètement détruite par un bombardement lors de la première guerre mondiale.

Parallèlement à sa carrière d’architecte, il fut nommé Professeur puis Directeur à l’Académie de Bruxelles. En 1906 lui fut confiée la construction de l’hôpital Brugmann (inauguré en 1923). Nous devons encore à ce génial architecte la Gare Centrale, avec sa magnifique verrière, un "puits de lumière" à admirer dans la salle des guichets. Le musée des Beaux-Arts et sa salle Henry le Boeuf avec son exceptionnelle acoustique constitue une autre de ses réalisations majeures.

Horta meurt à 86 ans. En l’an 2000, quatre de ses œuvres marquantes seront classées au patrimoine mondial de l’Unesco comme "valeur universelle d’exception". Cette reconnaissance, il faut l’espérer, conduira à une meilleure connaissance de l’univers fascinant du grand maître de l’Art Nouveau: Victor HORTA.

* Savez-vous que la maison Autrique, première construction marquante de "l'Art nouveau" par Victor Horta a comme directeur Etienne Shréder, du groupe "Looking for Bernard", auteur également de bandes dessinées. Par son exemplaire restauration en 1990, due à Fr. Metzger, la maison Autrique a retrouvé toute son authenticité et sa décoration d'origine. A visiter sans plus attendre, chaussée de Haecht, 266 à 1030 BRUXELLES

Retour

Septembre 2013: l'éditorial de Suzanne Ferry

La prochaine Biennale de la Chanson française débutera par la sélection des candidats dès le début de l'an prochain.

«Un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité, un optimiste voit l'opportunité dans chaque difficulté» (Winston Churchill)

Voulez-vous devenir membres en nous aidant dans les frais du programme ? Il vous suffit de verser 5 € sur le compte du Cabaret aux Chansons 000-1239986-35. La Poste vous déposera la version papier.

Nous vous rappelons que les spectacles commencent en général à 21 h. Le bar est ouvert à 20 h. Le prix d'entrée, sauf mention contraire, est toujours de 5 €, remis intégralement aux artistes. De plus, nous prenons en charge les frais Sabam…

À méditer: «Il ne suffit pas de tourner la page, parfois il faut changer de livre»

La rentrée, l'heure des résolutions: la patience au boulot, le sourire dans la rue, le régime pour madame, mais peut-être aussi s'intéresser à la chanson française, aux artistes d'aujourd'hui, aux «petits lieux» si nécessaires aux jeunes auteurs et aux autres…

Bruxelles, ma Belle

Nous avions parlé, dans un programme de 2009, des statues de la façade de l'Hôtel de ville. Aujourd'hui, nos recherches nous conduisent vers le PALAIS DUCAL où vécurent, dès le XIe siècle les comtes de Louvain, futurs ducs de Brabant. Ceux-ci avaient, dès l'an 1000, leur castel fortifié à l'île St Géry, entre les deux bras de Senne. Mais ils ont très vite emménagé dans un endroit moins humide dominant le bourg : la colline de Coudenberg. On ne sait rien du premier Château, qui fut, au cours des siècles, constamment agrandi.

Au XIVe, sous le règne de Wenceslas, on édifia une chapelle, embellie plus tard par Charles-Quint. C'est dans les caves de cette chapelle, visibles aujourd'hui encore, que fut conservé durant trois siècles, le fameux trésor de l'ordre de la Toison d'or qui se trouve à Vienne à ce jour.

Durant «les grandes heures de la Maison de Bourgogne», le Château Ducal prit des allures princières. Philippe Le Bon choisit Bruxelles pour principale résidence, ce qui favorisa, dès lors, l'essor immobilier.

Il fit construire, à l'occasion du mariage du frère de Jean sans peur, une salle d'apparat. C'est encore lui qui ajoute, en 1452, une aile fastueuse : «La MAGNA AULA». C'est dans cette salle que Charles-Quint abdiqua solennellement en 1555. Presque toutes les têtes couronnées d'Europe y furent reçues aux XIVe et XVe siècles.

Mais qu'est devenu ce fabuleux édifice qui englobait la Place royale, la rue Montagne de la Cour, l'emplacement de l'actuel château royal et le début de la rue de Namur?

Un matin de 1731, il s'embrasa complètement, au départ des cuisines dira-t-on. Seule fut épargnée la fabuleuse bibliothèque de Bourgogne qui se trouvait dans les caves. On ne put sauver ni les toiles de Rubens, ni de Velasquez, ni son mobilier de bois précieux, pas plus que les pauvres servantes qui dormaient sous les combles, enfermées chaque nuit pour empêcher que les valets n'aillent les retrouver !!!

Curieusement, on oublia ces ruines (repaire de brigands) durant plus de 50 ans avant que l'on ne décide d'y construire l'actuelle Place Royale, les gouverneurs autrichiens ayant trouvé refuge entretemps au palais de Nassau. (Charles de Lorraine étant gouverneur des Pays-Bas autrichiens).

Le prestigieux palais avait heureusement été peint et dessiné par quelques bons artistes des XVIIe et XVIIIe, mais point de tapisserie ancienne, mise à part celle représentant la MAGNA AULA lors de l'abdication de Charles-Quint... Alors que cet art était florissant à Bruxelles et apprécié dans toute l'Europe. Le déclin survint peu à peu, et la dernière manufacture ferma ses portes en 1794.

Vous serez peut-être surpris d'apprendre qu'il existe depuis peu une tapisserie de 6,50 m sur 2,50 m tissée de nos jours, à la main et selon les procédés traditionnels.

S'inspirant des meilleures estampes représentant les vues panoramiques du Palais, il a fallu plus d'un an à Monsieur Robert Simaïs pour dessiner la maquette à la plume en format réduit, puis à la gouache en format réel et inversé (droite et gauche) pour les nécessités du tissage.

Il a fallu plus de deux ans à six ouvrières de la maison BRACQUENIE pour réaliser ce travail exceptionnel. On nous dit que ces six ouvrières, côte à côte maniaient les fuseaux avec une dextérité et une rapidité étonnantes: 2 450 couleurs différentes pour ces fils de laine et de soie, teintes dans ce même atelier auxquels s'ajoutent les fils d'or et d'argent.

On imagine aisément l'émotion après «la tombée de métier», quand on peut enfin contempler son travail en entier et sur l'endroit.

Mais pour nous, quelle frustration: après avoir été installée au Centre d'accueil de la Province de Brabant du World Trade Center, cette œuvre d'art unique est aujourd'hui conservée dans les locaux du Boulevard de l'Empereur... Et malheureusement, inaccessible au public.

D'après diverses recherches et un travail de J. d'Osta.

Retour

Novembre 2013: l'éditorial de Suzanne Ferry

«Être conscient que demain existera et que je peux avoir une influence sur lui.» - ALBERT JACQUARD.

Il nous a quittés en septembre. Ingénieur, biologiste, écrivain et j'en passe, il risque d'être oublié bien vite tant sa philosophie du bonheur parait simple, forgée en partie dans une enfance douloureuse.

Inquiet de l'avenir de l'humanité et de l'urgente nécessité de modifier nos valeurs, il nous explique dans sa "petite philosophie a l'usage des non-philosophes" (en livre de poche) un art de vivre fait d'humilité et de profonde réflexion.

L'actualité de ses propos nous interpelle. - À suivre absolument.

«Exprimer une idée est une activité difficile à laquelle il faut s'exercer ; la télé supprime cet exercice ; nous risquons de devenir un peuple de muets, frustrés de leur parole, et qui se défouleront par la violence» Albert Jacquart

«Sans imagination il ne pourrait y avoir création.» A. J.

* * *

Nous avons fait quelques découvertes intéressantes lors de la soirée du même nom. Nous vous proposerons leurs chansons dans nos spectacles à venir.

2014, l'année des élections! Mais nous vous la souhaitons néanmoins originale, belle à vivre et pleine de projets.

André Le Notre (1613-1700)

Rue du Marché aux Fromages, où nous nous trouvons, à 50 m de la Grand-Place, il n'y a pas d'espace pour un jardin. Pourtant dans ma maison, il y a quand même un petit coin de verdure: 1m30 sur 1m50. Je vous vois sourire «Veux-tu que je prête ma tondeuse?» Ne riez pas, c'est assez pour rêver si l'on ne lève pas trop les yeux et si l'on met une musique douce afin d'oublier le ronronnement des grosses cheminées ronflantes des restos environnants.

Mais quel immense bonheur, lorsque dernièrement, nous avons eu l'occasion de visiter Le Château de Versailles. Croyez-moi, ce fut pure émotion de découvrir la nuit s'éclairer de mille feux sur les jets d'eau des plus somptueux jardins de France.

2013 a été sacrée année André "Le Nôtre". Si Jean fut au service de Louis XIII, c'est bien son fils André qui devint l'indispensable et fidèle jardinier de Louis XIV durant plus de 35 ans. Fouquet, le surintendant des finances avait voulu éblouir son Roi avec son Château de Vaux aux jardins mirifiques en l'invitant lors d'une fête dont on parla longtemps. Il n'a réussi qu'à exciter la jalousie du monarque dont profita Colbert pour discréditer ce ministre dont il briguait la place. Le premier se retrouva en prison pour malversations financières et l'autre prit sa place le plus naturellement du monde.

De ce changement profita André Le Nôtre, qui avait attiré l'attention du Roi lors de sa visite à Vaux. Et ce fut la grande chance pour ce dernier artisan d'une longue lignée de jardiniers qui jusque là vivaient dans l'anonymat et avec des salaires misérables...

Pour Fouquet, à Vaux, il y eut déjà "cinq années de labeur incessant, 20 km de tuyauterie et neuf de charmille, jusqu'à 10 000 hommes travaillant sur le site," avant qu'il n'invite son roi en août 1661. Evidemment, pour Louis XIV, Il eut été intolérable de ne pas dépasser celui-ci en magnificence. Voilà pourquoi s'inscrit «le plus grand livre de l'histoire»: 1 000 hectares de jardins et de jeux d'eaux plus sophistiqués les uns que les autres.

Sitôt Fouquet emprisonné, le roi le pille (sic) meubles, tableaux, livres, tapisseries, jusqu'aux statues qui prennent la route sur des chariots bâchés.Dès l'automne, on retrouve courtisans et œuvres d'art à Versailles et chacun est ravi. Mais voilà, le principal écueil est l'absence d'eau dans la contrée, premier élément indispensable aux fontaines. Qu'importe, on y dépensera une fortune pour remplir les points d'eau. Les mares sont indigentes? Nulle rivière ne traverse le site? Alors on détourne, on crée des pompes puissantes pour élever l'eau d'un lac voisin, on construit des moulins, on dévie les rivières, on capte toute la pluie d'un plateau en réservoirs. Le XVII siècle a le goût de l'eau, l'aménagement du canal permet au Roi d'admirer lors des promenades le reflet des nuages et du soleil dans l'eau... Un livre complet relatera les dépenses englouties à cet effet.

La chambre du monarque se trouve au milieu du Château, c'est aussi le milieu du parc, lieu magique et centre du monde pour le Roi-Soleil, grand ordonnateur de l'harmonie universelle: le matin, il doit pouvoir apprécier du regard l'enfilade des jardins.

Le peintre Lebrun choisit les sculpteurs et passe commande, c'est Le Nôtre qui les place, l'essentiel étant de joindre esthétique et politique. On contribue à la sublimation de Louis XIV en peuplant son jardin de héros mythologiques... Autant qu'un parc, Versailles est un livre. Le Nôtre, ennobli et tout étonné de l'être, est plus «aménageur pharaonesque que cultivateur, il est hanté par la perspective plus qu'amoureux de la botanique» connaissant pourtant ses principales lois et surtout comment les appliquer, imposant une intelligence tenace; même les «surprises» ont été voulues et ordonnées: la sève doit filer doux quand il s'abandonne à goûter un spectacle dont il ne sait rien d'avance... Sa modestie rassure un peuple qui reconnait son talent même s'il reste dans l'intimité du roi plus que quiconque et pendant si longtemps.

Nous retournerons à Versailles et apprécierons son oeuvre sans doute d'un oeil plus averti. En attendant, il nous reste notre original et minuscule lopin de verdure pour respirer les très particulières senteurs humides de l'automne avant de pouvoir s'enivrer des parfums de printemps.

Retour